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La tête dans les pages
21 janvier 2008

NOVECENTO : PIANISTE (Novecento : un monologo)

NovecentoRoman d'Alessandro Baricco (1994)
Livres d'Alessandro Baricco déjà lus : aucun

Quatrième de couverture :
Né lors d'une traversée, Novecento, à trente ans, n'a jamais mis le pied à terre. Naviguant sans répit sur l'Atlantique, il passe sa vie les mains posées sur les quatre-vingt-huit touches noires et blanches d'un piano, à composer une musique étrange et magnifique, qui n'appartient qu'à lui : la musique de l'Océan dont l'écho se répand dans tous les ports.

Mon avis :
Il est difficile de parler de ce court texte de Baricco, tellement il faut le lire pour comprendre ce qui en émane. En 84 pages à peine, l'auteur crée une légende, un mythe. Un homme dont on aimerait croire l'existence. Danny Boodmann T.D. Lemon Novecento est un homme à part. Il ne connaît pas le monde, et pourtant le monde le connaît. Ou en tout cas, connaît sa musique et sa légende. Novecento n'existe pas. Officiellement, cela s'entend. Sa naissance n'est inscrite nulle part. Il n'a ni identité, ni numéro de sécurité sociale, ni diplômes. Tout ce qui définit un Européen en somme. D'ailleurs, existe-t-il vraiment? Le livre de Baricco est bien un monologue, comme son sous-titre original nous le précise, et rien ne nous prouve, finalement, que le trompettiste qui joue le rôle de narrateur, n'invente pas cette histoire. Mais combien de légendes ont bâti notre culture, auxquelles nous préférons croire que de perdre nos repères? Novecento fait partie de ceux-là.
La force de ce récit réside dans le pouvoir de Baricco de créer des images fortes en peu de mots (bâtir une légende en 84 pages, avouez que c'est un tour de force!). Voilà deux semaines que j'ai fini ce livre, et pourtant je reste hanté par ce personnage ô combien fascinant, et pourtant si triste. Comment ne pas être ému pendant le climax du roman, celui où Novencento se trouve sur la passerelle du bateau pour enfin poser le pied sur la terre ferme, sentant qu'il est enfin prêtalessandro_baricco pour cette nouvelle aventure? Ou ne pas être tendu pendant le joute de piano que notre héros dispute avec Jelly Roll Morton, soi-disant le plus grand pianiste sur terre? Sur terre, effectivement, mais sur les eaux vit un artiste qui crée une musique comme on n'en entendra jamais ailleurs. De plus, le narrateur nous raconte son amitié avec le pianiste, une amitié vraie, sans mensonge. Car Novecento, en vivant loin de la société, a eu la chance de ne pas connaître les corruptions et les humiliations qu'elle nous inflige, et l'influence néfaste qu'elle immisce en nous. Novecento est fait de ce mélange d'innocence et de sagesse propre aux grands personnages de la littérature. Comme dans les plus grands classiques, il nous met face à nos interrogations, notamment l'importance de nos rêves et la peur de la déception en s'y confrontant, sur l'identité et sur les décisions que nous devons prendre. Depuis ce livre, il me plaît d'aller au bord de la mer, de fermer les yeux, et d'écouter quelques notes de piano au large, qui me parviennent portées par le vent. Et dans ces moments-là, je sais que Danny Boodmann T.D. Lemon Novecento existe bel et bien.

Ils en parlent aussi : Catherine de Biblioblog Jeanne Zaph

Premières lignes :
Ca arrivait toujours, à un moment ou à un autre, il y en avait un qui levait la tête... et qui la voyait. C'est difficile à expliquer. Je veux dire... on y était plus d'un millier, sur ce bateau, entre les rupins en voyage, et les émigrants, et d'autres gens bizarres, et nous... Et pourtant, il y en avait toujours un, un seul sur tous ceux-là, un seul qui, le premier... la voyait. Un qui était peut-être en train de manger, ou de se promener, simplement, sur le pont... ou de remonter son pantalon... il levait la tête un instant, il jetait un coup d'oeil sur l'Océan... et il la voyait. Alors il s'immobilisait, là, sur place, et son coeur battait à en exploser, et chaque fois, chaque maudite fois, je le jure, il se tournait vers nous, vers le bateau, vers tous les autres, et il criait (adagio et lentissimo) : l'Amérique. Et puis il restait là, sans bouger, comme s'il devait rentrer dans la photo, avec la tête du type qui se l'est fabriquée tout seul, l'Amérique. Le soir après le boulot, et des fois aussi le dimanche, son beau-frère l'a peut-être un peu aidé, celui qui est maçon, un type bien... au départ il voulait juste faire un truc en contreplaqué, et puis... il s'est laissé entraîner et il a fait l'Amérique...


legende_oceanCe roman a été adapté au cinéma par Giuseppe Tornatore en 1998, sous le titre La Légende du pianiste sur l'océan, avec dans les rôles principaux Tim Roth, Pruitt Taylor Vince et Mélanie Thierry.

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Commentaires
G
"Océan Mer" n'étant pas encore emPALé, je ne pense pas le lire dans les prochains mois, mais je le garde dans un coin de ma mémoire, vu que je dois te donner mon avis depuis un moment déjà!
B
... me revoilà !<br /> Bon, concernant "Océan mer" les avis sont très partagés. Moi donc, je n'ai pas aimé du tout, sauf un passage au milieu du roman qui évoque le naufrage de la Méduse. Mais une quinzaine de pages merveilleuses sur 282 n'ont pas suffi à me convaincre. Je serais donc curieuse de connaître ton avis sur ce livre !
G
Lis ce livre, c'est un ordre. Ca te plaira sûrement si le film t'a touchée!
A
je n'ai pas lu le livre mais j'ai vu le film en 2007 et j'ai bcp aimé !
G
Je t'avoue que c'est par "Soie" que je pensais continuer mon incursion dans l'univers de cet auteur. Tu me fais peur en ce qui concerne "Océan mer", car j'ai juré à un copain que je le lirai, ce roman étant son livre préféré. Aurait-il des goûts douteux?
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